Assise à un coin de rue sous l’ombre d’un arbre, je regarde les voitures passer… Il est quinze heures et je n’ai toujours rien mangé. J’ai faim, j’ai chaud, je suis sale, je suis seule … Pourtant je n’ai que douze ans. Vous pouvez m’appeler Zalika.
Je n’ai pas connu ma mère, morte en couches en me donnant la vie. Je suis son unique enfant. Mon père ne m’aimait pas beaucoup, je lui rappelle peut-être trop ma mère. Nous sommes ce qu’on peut appeler « des malchanceux ». Je n’ai pas eu l’aubaine de grandir dans une famille normale avec un petit déjeuner, un déjeuner et un dîner. Mon père est vendeur d’arachides et de noix de cola ; ma marâtre fait le linge dans des familles aisées du quartier pour subvenir à nos besoins. Et quand je dis « nos », c’est vite aller en besogne. J’ai une demi-sœur et deux demi-frères jumeaux qui vont à l’école primaire publique Boukoki 2. Elle s’occupe d’eux et moi, je me débrouille.
Je sors de notre petite case à sept heure. Après un bain sommaire, je n’ai droit à un petit déjeuner que si la veille j’ai ramené ma part : vous l’aurez compris, je dois participer aux frais familiaux. Chaque jour, je dois ramener mille à deux mille francs au risque de dormir le ventre vide. Alors oui, pendant que mes frères cheminent vers l’école, je chemine vers les artères principales de la ville pour exercer le seul travail que je connais jusqu’à aujourd’hui : mendier.
Certains font semblant de ne pas me voir, pourtant je suis là. Je suis là, heurtée par quelques véhicules, dédaignée par d’autres usagers et d’autres vont jusqu’à me brimer parce que je n’ai personne pour veiller sur l’enfant que je suis. Heureusement, dans ce lot de personnes, certaines nous donne des pièces, du pain, du sucre, des galettes et parfois même des habits : Dieu vous le reconnaîtra.
Les gens nous considèrent comme gênants, ne veulent plus nous voir aux bords de leurs voitures encore moins dans la ville. Ils souhaitent qu’on disparaisse, qu’on nous chasse, qu’on nous punisse lourdement pour un acte que parfois nous n’avons pas choisi.
Aujourd’hui je suis curieuse de savoir quel sera mon avenir demain. Je pleure pour mes petits pieds douloureux parce que toute la journée je dois marcher, je pleure pour mon ventre creux et la maltraitance au quotidien, je pleure pour ce minimum de confort que probablement je ne connaîtrais jamais, pour cette école que peut-être, je ne fréquenterai aucunement. Je m’appelle Zalika, j’ai douze ans : profession, écolière de la rue.
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